Selon un imam pakistanais, le manque de ``pudeur``des femmes est responsable du coronavirus

Tariq Jameel, un imam très populaire au Pakistan, a appelé les femmes de son pays à faire preuve de plus de "pudeur" pour éviter la propagation de la pandémie de coronavirus.

Selon Tariq Jameel, "les actes répréhensibles des femmes" sont à l’origine de la propagation du nouveau coronavirus, Covid-19, à travers le monde.

Le religieux est très populaire au Pakistan. Il est suivi par des centaines de milliers de personnes sur les réseaux sociaux, notamment sur sa chaîne YouTube qui compte 3,5 millions d'abonnés. Lors d’un téléthon organisé par le Premier Ministre pakistanais afin de récolter des fonds pour lutter contre le coronavirus, l’imam a reproché aux femmes "qui étaient souvent peu habillées" d'être responsables de la pandémie. Il a ainsi appelé les Pakistanaises à faire preuve de plus de "pudeur" afin d'éviter la propagation de la maladie. "Si nous commençons à suivre un hadith (du prophète Mahomet), je jure devant Dieu que le corona disparaîtra", a affirmé Tariq Jameel en condamnant la "pratique de l'impudeur" des femmes et "l'immoralité" des jeunes. Il a ainsi demandé à "garder la morale intacte" dont le point culminant est "la pudeur", parmi "quatre points" destinés à "éloigner le mauvais œil". "Qui a démoli la pudeur dans mon pays ? Qui fait danser les filles de notre nation ? Qui raccourcit leurs robes ?", s'est ensuite indigné le religieux.

L’imam a ensuite accusé les médias du monde entier, notamment ceux du Pakistan, d’être des "menteurs" et de diffuser de fausses informations.

Le Premier ministre pakistanais, Imran Khan, ne l’a pas arrêté ni questionné au sujet de ses propos. Si ce dernier s’est excusé notamment pour ses remarques sur les médias, ce n’est pas le cas de Tariq Jameel. Cependant, son intervention a suscité un véritable tollé sur la Toile.

"Il est tout simplement absurde que quiconque, sous quelque prétexte que ce soit, suggère que la pandémie est le résultat du fait que des femmes portent des manches courtes […] Cela reflète simplement l'ignorance sur les pandémies ou un état d'esprit misogyne. Absolument inacceptable", a twitté la ministre des Droits de l'Homme, Shireen Mazari.

"La Commission des droits de l'homme est consternée par la récente déclaration de l’imam Tariq Jameel corrélant inexplicablement la ‘pudeur’ des femmes à la pandémie de Covid-19. Une telle objectivation flagrante est inacceptable et, lorsqu'elle est diffusée à la télévision publique, ne fait qu'aggraver la misogynie ancrée dans la société", a réagi à son tour la Commission des droits de l'homme du Pakistan via Twitter.

"Arrêtez de mentionner le corps des femmes. Elles ne sont plus le champ de bataille des ambitions politiques ou religieuses de quiconque", a déclaré Nighat Dad, une féministe reconnue.

Selon le Forum économique mondial, le Pakistan est classé à la 151e position sur 153 pour les disparités de genres. Le pays très conservateur n'a toutefois pas de loi obligeant les femmes à porter un quelconque vêtement. Néanmoins, les Pakistanaises font partie des femmes les plus discriminées du monde. Chaque année, elles sont des centaines à être tuées, fréquemment par des proches, pour avoir insulté leur "honneur", selon des organisations de défense des droits de l'Homme. En octobre 2016, le parlement pakistanais adoptait une loi afin de retirer la possibilité d'absoudre les auteurs de ces "crimes d'honneur". L'ancienne législation permettait aux coupables de s’en sortir impunément s’ils étaient pardonnés par leur famille.