Les leaders d'Afrique francophone doivent encourager les jeunes à entreprendre et créer de la valeur
Janine Kacou Diagou, fondatrice de l’organisation à but non lucrative Fondation BJKD, lance un appel aux décideurs de la sous-région francophone de l'Afrique afin qu'ils s'impliquent davantage dans le soutien des jeunes. Il y va de l'avenir des futures générations et de l'avenir du continent...
Dans son article L'aventure ambigüe de l'entrepreneuriat des jeunes d'avril 2017, La Tribune Afrique donnait la parole à Moussa Mara, ancien Premier Ministre du Mali, pour faire le point sur les difficultés rencontrées par les entrepreneurs, notamment jeunes, de notre continent. Si ce dernier soulignait les actions de promotion de l'entrepreneuriat jeune par les leaders politiques, qui encouragent les jeunes générations à créer de l'emploi et s'investir dans leurs projets, il soulignait également la nécessité de créer un « environnement favorable ». Cela passe également par des actions visant à développer autour des jeunes entrepreneurs un entourage support, apte à lui apporter en termes de motivation, de conseil et de retour d'expérience.
A l'évidence, il est difficile d'entreprendre. Tout entrepreneur(e) qui se lance doit faire face à de multiples obstacles, quel que soit le secteur ou la nature de son business : les difficultés dans la gestion de la trésorerie ainsi que du recrutement, les échecs, le doute, la solitude, le manque de motivation, d'accompagnement ou d'expérience... Ces facteurs expliquent que près de 4 entreprises sur 5 échouent dans le monde, selon des statistiques communément admises. En Afrique, les difficultés habituelles se conjuguent aux éléments indiqués plus haut : une relative instabilité sociopolitique et économique, une culture de l'entrepreneuriat encore limitée, un manque de valorisation des parcours entrepreneuriaux auprès du grand public.
Malgré tout, nous avons l'un des taux d'entrepreneuriat les plus élevés au monde, avec 22% de la population en âge de travailler qui choisit d'entreprendre contre 11,8% aux États-Unis et 5,3% en Chine - première et deuxième économies mondiales. Notons d'ailleurs que le continent a aussi le taux d'entrepreneuriat féminin le plus élevé au monde (27%), ce qui souligne le dynamisme de nos mères, filles et sœurs, sur le plan économique.
Evidemment, il est important d'observer le taux d'échec des jeunes entreprises pour bien saisir le sens de ces chiffres. Là encore, l'Afrique, dans sa grande diversité, figure parmi les leaders avec un peu plus de la moitié de ses jeunes pousses qui échouent dans les dix premières années de leur création (54,20% selon l'organisation à but non lucratif GreenTech Capital AfricaFoundation) contre 67% aux États-Unis d'après le Bureau of Labour Statistics et 90% d'entre elles en France, selon l'INSEE (Institut national de la statistique et des études).
Ces statistiques rendent compte d'une résilience certaine d'entrepreneurs africains forcés d'innover s'ils souhaitent survivre, comme le soulignait la Banque mondiale dans une publication de mars dernier. Néanmoins, malgré ces perspectives plutôt positives, l'entrepreneuriat effraie encore beaucoup les jeunes (15-34 ans) - qui ne représentait que 6% de la masse entrepreneuriale totale en 2019.
La jeunesse africaine est la « ressource la plus précieuse, la plus innovante et la plus dynamique » de son continent (BAD, 2019). Elle représente actuellement 60% de la population et devrait atteindre 850 millions d'individus d'ici 2050. Qu'est-ce que cela signifie ? Que nos jeunes seront les premiers à mobiliser si nous souhaitons remplir l'objectif de 450 millions nouveaux emplois créés sur les 20 prochaines années fixé par la BAD en 2017. Ce, afin de faire face à une augmentation démographique qui posera un véritable stress sur l'économie réelle et pourrait, dans le cas contraire, se traduire par une augmentation massive du chômage et de la pauvreté.
Nos jeunes doivent trouver le soutien et les ressources dont ils ont besoin pour prendre les risques nécessaires à la transformation de leurs idées en entreprises durables. Ils doivent être guidés, accompagnés, financés et conseillés - notamment par une génération plus âgée, plus expérimentée et plus successful. En d'autres termes, il incombe de la responsabilité des « anciens » de prendre part à l'épanouissement entrepreneurial de leurs « petits ».
C'est là tout l'objet de ma Fondation Bénédicte Janine Kacou Diagou (BJKD) qui vise à encourager l'entrepreneuriat des jeunes et contribuer à l'amélioration de l'employabilité ainsi que de l'accès à un emploi décent et stable pour les jeunes, en mettant un point d'honneur à promouvoir la parité Homme-Femme.
Chaque année, nous accompagnons 100 jeunes entreprises ivoiriennes dans le cadre de notre Prix BJKD pour l'entrepreneuriat, parmi lesquelles 5 d'entre elles bénéficient d'un partenariat plus poussé. Celui-ci se traduit notamment par un soutien financier allant de 2 millions à 15 millions de Fcfa. Aussi, nous encourageons les dirigeants politiques et économiques à se rapprocher de la jeunesse. C'est ainsi que nous avons invité le directeur général de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM, le marché financier régional d'Afrique de l'Ouest) Edoh Kossi Amenounve, à présider le jury du Prix BJKD 2020 qui s'est tenu à Abidjan, en septembre dernier.
Aller au-delà l'Afrique francophone
Si jusqu'à présent, notre action ciblait uniquement la Côte d'Ivoire, nous avons décidé de nous déployer sur l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest et centrale francophone dès la saison 2021, afin d'accompagner un plus grand nombre de jeunes entrepreneurs dans leurs projets. Néanmoins, à elle seule, la Fondation BJKD ne peut pas tout faire.
L'Afrique francophone a encore peu de Fondations de ce type, contrairement à l'Afrique anglophone qui compte celles des entrepreneurs à succès Tony Elumelu, Mo Ibrahim ou encore Aliko Dangote. Visionnaires, ces derniers ont compris qu'ils ont besoin des jeunes pour réussir autant que les jeunes ont besoin d'eux. Mais du côté francophone, la Fondation BJKD est encore l'une des rares à agir dans ce sens.
C'est pourquoi nous appelons l'ensemble des dirigeants économiques et entrepreneurs à succès d'Afrique francophone à soutenir notre action en participant à la transmission de savoir, au développement croisé de compétences (capacity building) ou tout simplement en partageant leur propre parcours auprès de nos jeunes. Un investissement à faible coût au potentiel énorme qui, bien souvent, suffit amplement à changer un destin.
Source: afrique.latribune.fr
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