Enfant (trop) stressé : quels signes repérer ?

Le stress n’est pas l’apanage des adultes, et les enfants, mêmes petits, peuvent être touchés. Quels signes doivent alerter ? Les troubles du sommeil ou de l'appétit sont souvent un indice.

Quelques pistes

Le stress a envahi nos vies, c’est un fait. Et pour reprendre une formule célèbre : « U peu, ça va, mais trop… bonjour les dégâts. » C’est valable pour nous et pour nos enfants. Comment savoir s’ils sont confrontés à un trop-plein de stress ? Pour répondre à cette question, nous avons rencontré Véronique Lemoine Cordier et Céline Durand, toutes deux psychologues spécialisées dans l’enfance et les relations familiales.

Au fait, le stress, c’est quoi ?

« Le stress est une réponse physiologique du corps face à un événement extérieur perturbant et inhabituel », explique Céline Durand, psychologue. Ce phénomène physiologique se manifeste par la surproduction de deux hormones, l’adrénaline et le cortisol. A petites doses, ce peut être source d’énergie. Mais l’adrénaline sécrétée en trop grande quantité peut provoquer des comportements inhabituels : hypervigilance, peur, fuite ou attaque. Quant à l’augmentation anormale de cortisol, elle peut engendrer un sentiment de découragement, de tristesse ou d’insécurité. Contrairement aux adultes qui peuvent identifier ces situations, l’enfant est démuni et il ne peut pas verbaliser son anxiété.

Petite enfance : des enfants touchés dès l’âge de 2 ans

Les faits sont là et – sans forcément dramatiser – il est important de poser le constat, comme le fait Véronique Lemoine Cordier, psychologue : « Dans ma pratique, avant, je voyais des enfants de 7 ou 8 ans consulter car trop stressés. Aujourd’hui, je vois des petits de 18 mois ou 2 ans venir avec, déjà, des signes de stress évidents. » Quels sont ces signes pour un petit ?

Le sommeil est souvent altéré en premier. « Pour un petit enfant, le sommeil perturbé, c’est le trouble par excellence », confirme Véronique Lemoine Cordier. Mais ce n’est pas le seul.

Certains enfants peuvent se ronger les ongles dès l’âge de 18 mois ;

Présenter des troubles de l’appétit ;

Ceux qui bougent absolument tout le temps, qui font du bruit de façon incessante peuvent être stressés et angoissés ;

Certains maux de ventre ou de tête peuvent être causés par le stress ;

A repérer : l’apparition de tics nerveux comme le clignement des yeux ou un balancement inhabituel. « L’enfant peut tortiller ses cheveux, et faire des boucles au point parfois d’arracher une mèche », constate Céline Durand

De manière plus générale : tout ce qui présente une rupture dans le comportement doit retenir l’attention des parents. « Tout symptôme devient alarmant quand il dure dans le temps », résume Céline Durand.

Au primaire : quels signes repérer

Tous les signes décrits ci-dessus pour l’enfant en bas âge – et principalement les troubles du sommeil et de l’appétit – peuvent encore se constater chez l’enfant qui a passé l’âge de raison. A l’âge du primaire, il convient d’être attentif aux signes suivants :

Un enfant qui pleure pour un oui ou pour un non s’il ne réussit pas à faire quelque chose, qui se décourage d’emblée, qui porte des jugements négatifs sur lui-même : « Je suis vraiment nul, je ne vais pas y arriver, ce n’est pas pour moi… »

Celui qui développe une angoisse de performance. « C’est est un comportement que l’on voit de plus en plus chez les enfants du primaire et début du collège », constate encore Véronique Lemoine Cordier.

Un comportement régressif comme une énurésie (pipi au lit) qui n’existait pas avant, ou recommencer à sucer son pouce alors que l’enfant avait arrêté…

L’enfant qui présenterait des signes d’irritabilité, de colère, d’agressivité, de repli sur soi…

Autre signe à repérer : des difficultés de concentration. Dans ce cas, c’est souvent la maitresse qui alerte les parents et signale que l’enfant est souvent dans la lune, qu’il n’arrive pas à faire son exercice jusqu’au bout. En effet, « l’enfant est tellement mobilisé par son stress qu’il n’arrive pas à trouver l’énergie suffisante pour accomplir correctement une autre tâche », explique Céline Durand.

 

Soulager une tendinite du genou

A l’adolescence, il est plus délicat de noter des changements de comportements car, pour reprendre l’expression de Céline Durand, « l’adolescence est la période de l’extrême. Et il faut être à l’écoute car l’adolescent est souvent secret. » Mais là encore, un changement de comportement, d’une façon ou d’une autre, alerte les parents. « A moins d’avoir un adolescent hyperintroverti, certains signes ne passent pas inaperçus », rassure Véronique Lemoine Cordier.

Certains traits de caractère sont exacerbés, il peut y avoir des troubles de l’humeur, qui peuvent dans certains cas engendrer des troubles de la personnalité.

Chez certains adolescents, un médecin peut poser le diagnostic d’une dépression, manifestée parfois par le refus d’aller à l’école. L’école devient un lieu de performance, et quand cette performance n’est pas au rendez-vous, l’ado peut être en grande détresse et perdre l'estime de soi.

Des cas de burn-out peuvent exister : tout d’un coup, l’adolescent arrête tout, décide de ne plus sortir de sa chambre, de ne plus aller au lycée, de se couper de la vie sociale. « Un patient travail d’accompagnement doit être mis en place pour réussir à verbaliser l’anxiété, la peur et le stress, pour se l’approprier. Ensuite, il faut aussi retrouver un apaisement au niveau du corps, afin de rééquilibrer ses mécanismes physiologiques, prendre soin de soi, retrouver confiance en soi. Cela demande un accompagnement continu. Ces années peuvent être difficiles », explique Céline Durand.

Les principales sources de stress chez l’enfant

Les causes principales : la plus importante source de stress est la séparation d’avec les parents. « Même une semaine de séparation, le temps de vacances chez les grands-parents peut être source d’angoisse pour l’enfant », explique Véronique Lemoine Cordier. Et aussi : une hospitalisation, des déménagements à répétition, la séparation d'avec une nounou très attachée.

Les autres raisons de stress pour un enfant peuvent être aussi une situation familiale perturbée – que ce soit par la séparation des parents ou l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur –, ou une situation sociale type entrée à l’école, ou harcèlement à l’école...

A cela s’ajoute un rythme de vie très stressant : « Aujourd’hui, le rythme d’une famille est hallucinant et en soi hyperstressant, constate Véronique Lemoine Cordier. Les enfants récupèrent ce qu’ils “sentent” chez les parents. Et l’on oublie de leur dire que ce stress n’est pas le leur. »

Que faire ?

Les parents en parlent souvent au pédiatre en premier, et ils ont bien raison car le simple fait de prendre conscience du stress de son enfant est déjà une étape décisive dans le traitement. Véronique Lemoine Cordier est très rassurante sur les bienfaits de la parole : « Il faut aussi bien dire aux parents qu’un rien déstabilise un enfant… mais qu’un rien le restaure. Ça va très vite dans un sens comme dans un autre heureusement aussi. »

Quand cela est nécessaire, notre psychologue peut conseiller une aide extérieure : « Il peut être utile de s’en remettre à des professionnels… non pas parce qu’ils sont plus intelligents mais parce qu’ils sont extérieurs. Combien de fois ai-je l’impression de dire la même chose que les parents, mais comme c’est dit par une personne tierce, cela a tout le poids de ce qui a été déposé avant par les parents. »

Quelques pistes

Et voici encore quelques conseils que Céline Durand peut souvent proposer dans ses consultations.

Valoriser l’enfant en lui donnant 20 ou 30 minutes d’attention par jour, « rien que pour lui ».

Créer un environnement propice à l’équilibre.

Favoriser le contact avec la nature. « Le contact avec la nature est très important : cela régénère, donne un sentiment de liberté, même 15 minutes par jour. »

Organiser la vie de l’enfant de manière à ce qu’il ait des moments d’apaisement.