Discipline positive : comment se faire obéir par un enfant difficile ?
D’un côté on prône le retour de l’autorité, de l’autre on déplore l’enfant roi … et s’il y avait une troisième voie, entre l’autorité et la permissivité ? C’est ce que propose la Discipline Positive de Jane Nelsen, une approche éducative pragmatique centrée sur l’encouragement. Découverte de cette nouvelle forme d’autorité avec Béatrice Sabaté, son ambassadrice en France.
Caprices, pleurs... Vous avez tout essayé pour calmer vos enfants ? La discipline positive peut être une solution ! Centrée sur l'identification des besoins derrière les comportements de l'enfant et la recherche de solutions, l’autodiscipline et la responsabilisation, cette approche éducative se veut très pragmatique avec ses « outils ». Vendu à plus d’un million d’exemplaire de par le monde, traduit dans une vingtaine de langues, l’ouvrage de référence de Jane Nelsen, La Discipline positive, sort enfin en France. Retour sur cette pédagogie par l’encouragement avec Béatrice Sabaté, psychologue clinicienne et formatrice en Discipline positive, qui signe l’adaptation française de ce guide.
En tant que parent, on pense souvent qu’il y a deux voies en matière d’éducation, l’autorité ou la permissivité. Y en aurait-il une troisième ?
Béatrice Sabaté : Depuis des générations, on se pense obliger de choisir entre la fermeté et la bienveillance. Le plus souvent même, on oscille entre les deux. Nous sommes naturellement portés vers la bienveillance avec nos enfants, mais quand ils font des bêtises, des caprices, on punit ; on bascule dans la fermeté. Puis l’on s’en veut, on fait un câlin ; on re-bascule alors dans la bienveillance. En Discipline positive, l’idée est d’éviter cette danse entre fermeté et bienveillance.
Face à un enfant difficile ou un enfant colérique, comment réagir ?
Selon la discipline positive, il faut entrer en lien avec l’enfant avant de le corriger. Cela nécessite d’avoir une écoute de qualité, de valider ce qu’il ressent, mais aussi parfois, de prendre soi-même le temps de gérer ses émotions. Au lieu de réagir au quart de tour à un acte inapproprié de son enfant sous l’effet de la colère, mieux vaut parfois faire une pause – c’est l’outil « temps de pause ». Des études ont montré que lorsque l’on est hors de soi, physiologiquement on n’est plus capable de réagir avec raison. Mieux vaut donc dire à son enfant, par exemple : « tu utilises des mots désagréables. Laisses-moi le temps de me calmer, on en reparle après ».
Mais après, n’est-ce pas trop tard pour que l’enfant comprenne qu’il a fait une erreur ?
En Discipline positive, il y a toujours une seconde chance. Apprendre à l’enfant à réparer ses erreurs et à en faire des opportunités d’apprentissage est essentiel dans cette démarche.
Faut-il continuer à punir un enfant difficile ?
La punition est efficace à court terme, dans le sens où c’est un moyen rapide de mettre fin à un comportement inapproprié. En revanche, elle n’aide pas à grandir car elle n’enseigne pas les qualités que l’on souhaite transmettre. Elle fait naître chez l’enfant le retrait, le ressentiment, la revanche, l’humiliation, la rébellion. C’est pourquoi elle n’a pas sa place dans la Discipline positive. Cela ne veut pas dire pour autant que tout est permis ! Chaque acte a une conséquence. Cette conséquence ne sera pas la punition, mais la « réparation ».
Comment peut-on amener un enfant à réparer son erreur ?
La réparation doit être l’occasion d’apprendre, de s’améliorer. Par exemple, ma fille n’a pas respecté l’heure de sortie et rentre à 20 heures au lieu de 19 heures. Si je la punis en la privant de sortie, elle n’aura pas l’occasion de faire mieux, différemment. Si je prends le temps de réfléchir avec elle à des solutions concrètes pour l’aider à respecter les horaires, je lui donne l’opportunité de faire mieux et d’apprendre à respecter ses engagements.
L’un des principes de la discipline positive est d’impliquer l’enfant dans la mise en place des règles et des conséquences en cas de non respect des règles. Pourquoi ?
En Discipline positive, en parle beaucoup des choses à l’avance. Réfléchir avec l’enfant à ce qu’il faut faire pour que telle ou telle situation se passe bien, à ce qui se passera si ça se passe mal, mais aussi à se mettre d’accord sur ce que l’on attend de lui. Car adulte et enfant, nous n’avons pas les mêmes attentes. Par exemple, un enfant considérera sa chambre rangée si tout le bazar est dans un coin. Pas nous ! Impliquer l’enfant permet aussi de le responsabiliser : il a toutes les cartes en mains, il a fait un choix dans sa manière d’agir en sachant qu’il s’exposait à telle ou telle conséquence. Bien sûr, ce niveau d’implication sera différent selon l’âge de l’enfant.
Impliquer son enfant difficile, n’est-ce pas lui donner l’occasion de « marchander », d’en profiter pour demander toujours plus ?
Il est en effet naturel de craindre de perdre le contrôle, de basculer dans la permissivité, car l’on vient d’une culture où c’est soit l’autorité, soit la permissivité. Il est indispensable que l’autorité reste entre les mains de l’adulte, mais que l’enfant soit impliqué. Plus il est impliqué, plus il va respecter les règles. Il faut lui faire confiance. Impliquer l’enfant permet de développer chez lui les sentiments d’appartenance et de contribution, deux besoins essentiels.
Mais avant même de punir, comment peut-on amener son enfant difficile à obéir ?
Plutôt que de donner un ordre à son enfant, on va lui poser une question. Par exemple, à la place de « va te laver les dents », on va lui demander « que se passe-t-il si tu ne te laves pas les dents le soir ? ». Avec l’ordre, c’est moi l’adulte, qui impose. C’est un référentiel externe. En revanche, en utilisant le questionnement, on développe davantage le référentiel interne : l’enfant devient acteur de son devenir. Cela développe chez lui la responsabilité, l’autodiscipline.
Et pour se faire obéir, il faut avant tout comprendre ce qui motive l’enfant à agir de la sorte…
En effet, et c’est pour cela que la discipline positive se base sur 4 types d’objectifs-mirages : accaparer l’attention, prendre le pouvoir, prendre une revanche, renforcer sa croyance d’incapacité. On les appelle « objectifs-mirages » car ils reposent sur des croyances erronées. Par exemple, l’enfant essaie d’accaparer l’attention car il croit – à tort – qu’il compte pour nous seulement si notre attention est centrée sur lui. Décoder ces objectifs mirage est essentiel pour répondre aux besoins cachés des enfants et pour mieux les gérer. Or pour les décoder, il suffit souvent de s’attacher à nos propres émotions. Face à notre colère, culpabilité, inquiétude, agacement, l’enfant va tenter d’accaparer l’attention. Lorsque que l’on se sent menacé dans notre autorité, il va tenter de prendre le pouvoir ; si l’on est déçu, il va vouloir prendre sa revanche.
La discipline positive nous incite donc à réfléchir à notre propre comportement. Est-ce une discipline pour nous aussi, parents ?
Il s’agit en effet de grandir et faire grandir. Le mouvement va dans les deux sens. Avec les mouvements des années 60, on est sorti du modèle de soumission. Les enfants ont internalisé un modèle plus égalitaire. Quand on va lui demander d’obéir, il ne va pas le faire. Il agit davantage en observant. Or, nous sommes, parents, ses premiers modèles.
Source : magicmaman.com
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