Mon enfant est ``lent``: comment l`aider ?

Difficile, pour un enfant qui a besoin de plus de temps que la moyenne, de s’insérer dans une société qui prône le culte de la vitesse et de la performance. Toute la journée, il est prié de se dépêcher et peine à trouver un rythme qui lui convient. Son quotidien est un perpétuel marathon. Pourtant, ce n’est pas une question d’intelligence ! Un simple changement de méthode permet de mieux répondre à ses besoins, comme nous le montre Audrey Akoun, psychothérapeute et experte en psychologie positive.

Comment ça se manifeste ?

Il a du mal à se concentrer en classe, il ne termine jamais ses exercices, il se perd en cheminements et en réflexions, il passe par mille circonvolutions pour aller d’un point A à un point B, il manque d’autonomie. A la maison, il faut constamment lui répéter les choses, l’encourager à ne pas perdre le fil de ce qu’il fait. Il rêve, il digresse. Il se décourage vite aussi (“Je n’y arriverai jamais ”), manque de confiance en lui (“ De toute façon, c’est pas la peine d’essayer, je suis nul ”)… Oui, votre enfant a clairement du mal à s’inscrire dans un rythme effréné, mais est-ce pour autant une mauvaise chose ? “ Pas du tout, martèle Audrey Akoun, psychothérapeute et experte en psychologie positive. Le terme d’enfant ”lent” est extrêmement péjoratif.

On juge ces enfants lents par rapport à une norme, par rapport à un rythme qui convient à la majorité des enfants et des adultes. Sans cette pression de rapidité, ces enfants n’auraient aucun mal à accomplir les choses. Ils ne sont pas lents, ils ont juste besoin de plus de temps que d’autres.  ” La spécialiste l’affirme : ce fonctionnement différent n’est ni un signe de faiblesse, ni un signe de retard. “Cela n’a rien à voir avec l’intelligence ou la paresse. Ces enfants sont tout aussi capables de compréhension que les autres. Simplement, ils ont besoin d’un temps supplémentaire d’analyse. A nous de nous adapter pour les aider à avancer. ”

D’où ça vient ?

Parfois, cette lenteur concerne des enfants au cerveau foisonnant, hyper réactif. Ils ont du mal à se canaliser, font de multiples détours avant de parvenir à un résultat. “Ils peuvent aussi rester complètement bloqués si on les presse trop. ”, note la thérapeute.  La peur du jugement des autres, de faire des erreurs et d’échouer peut aussi expliquer cette difficulté à accélérer. “Certains enfants sont minutieux, perfectionnistes. Ils ont besoin de prendre le temps de bien faire les choses, vérifient tout. Forcément, cela les ralentit. ” Certains enfants vivent aussi dans l’instant présent et n’ont pas conscience du temps qui passe. La notion de “ devoir à accomplir ” les ennuie profondément : ils ne voient pas l’intérêt d’accélérer et sont en quête de sens. Conséquence : on s’énerve vite.

Les “ Dépêche-toi ! ”, “ Nous allons être en retard ” se répètent à l’infini, tandis que votre enfant en est encore à compter les céréales dans son bol, jusqu’à la crise, inévitable. A l’école, c’est un peu différent. La comparaison avec les autres enfants, ceux qui suivent le rythme, décourage. “ Ils ont fini et pas moi ! ” L’enfant laisse son travail inachevé, se détourne de ses objectifs. Il s’empêche d’intervenir à l’oral alors même qu’il est capable de le faire. Il se renferme sur lui-même ou, à l’inverse, se rebelle et se transforme en élément perturbateur de la classe. “Il adopte ce comportement pour masquer cette lenteur qu’on lui fait ressentir comme une défaillance. ”, ajoute Audrey Akoun.

Bien souvent, c’est l’enseignant qui donne l’alerte. A l’incompréhension succède l’inquiétude : “Mon enfant est-il normal ? Sera-t-il capable de passer dans la classe supérieure ? ”. “Si les parents sont eux-mêmes concernés par ce trait de personnalité, ils parviennent davantage à relativiser, observe la psychothérapeute. Ils savent qu’en prenant en compte ces besoins particuliers, tout peut changer ! ”

Que faire pour l’aider ? 

Audrey Akoun propose ainsi une série de conseils pour mieux accompagner votre enfant :

- Prendre du recul et dédramatiser. Bannissez l’étiquette d’”enfant lent”, néfaste pour son bon développement psychologique. Prenez conscience du fait qu’il a simplement besoin d’un temps supplémentaire pour accomplir ce que vous lui demandez.

- Instaurer des routines. Votre enfant se posera moins de questions s’il agit par habitude et automatisme. Définissez avec lui un temps de travail, un temps de loisir et un temps d’entraide au sein du foyer : savoir exactement à quelle heure il aura terminé devrait le rassurer.

- Morceler les tâches. De la même manière, mettez en place une minuterie durant le temps de ses devoirs : 5 à 10 minutes par exercice, pas plus. Découpez son travail en petites unités pour lui montrer que si l’on adapte et respecte son rythme, il est tout à fait capable de réussir ce qu’on lui demande ! Un bon moyen de lui faire prendre confiance en lui. 

- Prévenir les conflits : Ayez conscience de ses besoins et revoyez vos exigences dès que possible. Parfois, il suffit de peu de choses pour éviter les situations qui tournent mal. Il met un temps infini à se préparer le matin ? Réveillez-le plus tôt ! Mettez en place un tableau de motivation ou fixez-lui des petits challenges sous forme de jeu. En clair, désamorcez les moments de tension connus d’avance et trouvez des astuces pour l’amener à coopérer !

- Travailler en intéraction : Ne le laissez pas mener ses travaux en autonomie, en vous contentant d’évaluer à la fin ses avancées. Privilégiez plutôt l’échange, posez-lui des questions, reformulez, travaillez la narration, éveillez sa curiosité et changez de méthode dès qu’il ne comprend pas pour garder son attention !

- Favoriser sa concentration : S’il est facilement distrait ou du genre rêveur, aidez-le en limitant les distractions. Rangez la tablette, éteignez la télévision ou la radio dès qu’il travaille et incitez-le à s’installer dans un endroit calme, à son bureau, plutôt qu’au sein de la pièce principale où tout le monde circule.

- Encouragez-le ! A l’école comme en dehors, il a sûrement des matières de prédilection. Il est doué pour la danse, le jardinage, le piano, le dessin, la cuisine ou les puzzles ? Félicitez-le dès qu’il réussit une activité, y compris une tâche minime. Valorisez sa méticulosité, son envie de bien faire. Récompensez même simplement sa volonté de s’y mettre. Tout est bon pour nourrir l’estime de soi ! 

- Collaborer avec son enseignant : Définissez ensemble la meilleure façon de s’adapter à son rythme. Voyez quels outils l’école est en mesure de fournir pour lui permettre de progresser. Efforcez-vous de reproduire à la maison ce qui fonctionne vraisemblablement en classe.

- Rassurez-vous, vous aussi, sur cette particularité et apprenez à la considérer sous un jour positif : prendre son temps permet de s’appliquer et d’être satisfait de son travail. S’évader et rêver nourrit aussi l’imagination, la créativité, développe des ressources intérieures qui lui seront tout aussi utiles pour sa vie future. Plus vous respectez ses besoins, plus vous lui laissez la possibilité de vous prouver qu’il peut s’en sortir, à son rythme.