Basant Motawi, une Egyptienne en lutte contre les violences sexuelles

"L'Obs" publie chaque semaine le portrait d'une jeune femme entrepreneuse en Afrique. Cette initiative a été lancée en partenariat avec la plateforme mondiale de développement économique Women in Africa (WIA) qui, à l'occasion de l'ouverture de son deuxième forum, les 27 et 28 septembre, à Marrakech, a élu 54 jeunes femmes, parmi 1.200 dossiers. Leur particularité : elles ont toutes monté récemment leur entreprise dans tous les domaines (digital, santé, agroalimentaire, finances, énergie).

Aujourd'hui, nous publions notre rencontre avec Basant Motawi qui a créé Aspire pour lutter contre les violences faites aux femmes dans son pays.

C'est une jeune fille aux longs cheveux bruns et au sourire timide qui se plaint du temps qui passe, "inexorablement". Basant Motawi n'a que 29 ans, l'air d'en avoir 10 de moins, et pourrait en avoir 10 de plus, tant son curriculum-vitae est déjà bien rempli.

Elle est née et a grandi au Caire, cette ville "monde", aux 15 millions d'habitants, qui la "fatigue" mais dont elle ne pourrait se passer trop longtemps. Dans sa famille, toutes les femmes étudient. Sa mère est médecin, sa sœur diplômée en sciences politiques. Basant, elle, a suivi les deux cursus. Ain Shams University, la faculté de médecine du Caire, puis l'université Johns-Hopkins de Baltimore, où elle a décroché un master en santé publique, et maintenant l'université du Maryland, où elle prépare un doctorat. Elle raconte : "Je voulais travailler en santé publique. Mais il n'y avait pas de spécialité de ce type en Egypte. J'ai présenté un dossier pour obtenir une bourse et pouvoir étudier aux Etats-Unis.

La sélection était assez sévère. Résultats scolaires, projet professionnel, entretien de motivation… Tout était étudié à la loupe. Je crois que je suis la seule Egyptienne à avoir été admise cette année-là."

Le thème de sa recherche pour son doctorat : l'impact des violences faites aux femmes sur leurs enfants en Egypte, Afghanistan, Jordanie et Pakistan. Quand elle était étudiante en médecine, Basant Motawi a vu trop de femmes arriver à l'hôpital, victimes d'attouchements sexuels, violées, ruées de coups… Elle a décidé, depuis, de consacrer sa vie à les aider.

Impact social

Il y a quatre ans, elle a commencé à étudier la création d'Aspire avec des amis d'Ain Shams University. Une plateforme qui recrute et entraîne des bénévoles pour collaborer avec la police, faire des rondes dans les lieux publics, jardins, métro, qui met en place des programmes de prévention dans les universités et les entreprises et prend en charge des femmes victimes de harcèlement sexuel ou de violences. Opérationnelle depuis le début de l'année, Aspire s'est déjà occupée de dizaines de femmes au Caire.

Lorsque nous la rencontrons en cette fin septembre à Marrakech, Basant Motawi vient de décrocher le Gold Award 2018 de Women in Africa, parmi les 54 femmes sélectionnées. Pour Marine Liboz Thomas, présidente de WIA Philanthropy :

"Son profil sort des stéréotypes de l'entrepreneuse africaine. Elle symbolise cette nouvelle génération qui veut que ses projets aient un impact social."

Basant Motawi espère que sa nomination va lui donner du poids et de la visibilité. Dans son pays, dit-elle, "les violences faites aux femmes, déjà parmi les plus élevées au monde, se sont encore aggravées depuis le printemps arabe".

 

 

Source : autre presse