Drogues, alcool, tabac au travail : un "coup de pouce" dangereux pour tenir le coup
Médicaments psychotropes, cannabis, alcool, tabac... Pour "tenir le coup" au travail, de plus en plus de salariés, dont des femmes, deviennent consommateurs de produits psychoactifs.
À l'occasion de la Journée nationale de prévention des conduites addictives en milieux professionnels ce jeudi 22 octobre, les entreprises tirent la sonnette d'alarme au sujet de ces pratiques à risques.
La consommation de produits psychoactifs au travail est loin de seulement concerner quelques cas isolés. C'est ce que met en lumière un sondage réalisé par BVA pour la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Midélca), dont la publication ce jeudi 22 octobre coïncide avec la Journée nationale de prévention des conduites addictives en milieux professionnels.
Réalisé auprès en 2014 par téléphone auprès de 605 dirigeants, encadrants et personnels RH, ainsi qu'auprès de 253 représentants du personnel ou syndicats du secteur privé et public, le sondage montre des résultats inquiétants. Ainsi, 91% des personnels interrogés estiment que des salariés de leur entreprise consomment au moins un produit psychoactif tel que l'alcool, le tabac, des médicaments ou du cannabis. 85% des sondés se dises préoccupés par la consommation de ces produits par leurs employés.
Des répercussions sur l'activité professionnelle
C'est l’alcool qui est vu comme la consommation la plus à risque (pour 72% des sondés), car ayant le plus de répercussions sur l'activité. Les sondés citent notamment comme conséquence la baisse de l'efficacité du salarié consommateur (64%), les risques d'accidents ou de maladie professionnelle (56%), l'absentéisme ou retards fréquents (56%), mais aussi la qualité de vie (51%), les conflits en entreprise (50%), l'atteinte à l'image de l'entreprise (43%) ou encore les incidents avec les clients ou usagers (22%).
La consommation de cannabis au travail en revanche, semble être sinon moins préoccupante, du moins mieux tolérée : 10% des personnels interrogés recensent ainsi des usagers de cannabis dans leur milieu professionnel.
Qui sont ces "dopés du quotidien" ?
Encore trop tabou, le problème de l'addiction au travail touche pourtant des profils très divers. "Concernant les hommes, les employés et les ouvriers sont plus sujets aux conduites addictives ». Les femmes ne sont pas épargnées, notamment chez les professions intermédiaires et les cadres.
Certaines professions sont aussi considérées comme plus sujettes à la consommation de produits psychoactifs. "Les milieux où on consomme beaucoup sont ceux de la construction, les arts et le spectacle, mais aussi la restauration et l'hôtellerie. En revanche, les niveaux de consommation les plus faibles sont plutôt constatés dans l'administration publique, l'enseignement, les milieux de la santé et de l'action sociale", poursuit Danièle Jourdain Menninger.
Doit-on pour autant en conclure que toutes les personnes consommant de l'alcool, des médicaments ou du cannabis pour tenir au travail sont des toxicomanes ? Non, rappelle Gladys Lutz, présidente de l'association Addictologie et travail, dans les colonnes du Figaro. "Ils ne sont pas toxicomanes mais, pour tenir au travail, bien dormir la nuit ou booster leurs performances, ceux qu'on appelle 'les dopés du quotidien' n'hésitent pas à consommer des substances addictives. Parfois au bureau, une à plusieurs fois par jour, et plus ou moins en cachette. Une consommation qui se banalise et inquiète les médecins et chercheurs sur ce véritable problème de santé publique.
C'est pour cette raison que l'addiction en milieux professionnels ne doit pas rester un tabou, mais au contraire être traité en conséquence. "Il n'est pas question d'instaurer la police des moeurs au sein de l'entreprise, mais de voir quels sont les bons programmes de prévention car cela concerne tout le monde, note Danièle Jourdain Menninger. Jusqu'à présent les politiques qui étaient menées, c'était plutôt la sanction, beaucoup le déni et le tabou. Or, il apparaît que si on se focalise sur les sanctions, personne ne parle de ses consommations. Il faut pouvoir aborder le sujet avec les salariés sans que l'on soit dans la crainte ou le déni. On voudrait aussi que le sujet soit discuté lors des négociations de branches."
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