Désirée Gnonsian Dénéo, SG de la Ligue ivoirienne des droits des femmes: ``Les femmes violées en Côte d’Ivoire ont entre 2 et 70 ans''

Les missions de la ligue sont plurielles. D’abord, nous sommes une association féministe agissant pour la promotion des droits de la femme en Côte d’ivoire, et plus précisément contre les violences faites aux femmes. Ce sont les violences psychologiques. Notamment le harcèlement, les violences sexuelles, les viols, la pédo-criminalité, l’inceste, le viol conjugal et les violences conjugales. A côté de cela, nous sommes engagés dans la promotion des femmes politiques.

Certains cas de violences basées sur le genre ainsi que des cas de viol dont vous avez été saisis ont récemment défrayé la chronique. Pouvez-vous nous en dire plus ?

On a eu l’affaire du violeur en série qui a défrayé la chronique. Mais actuellement, le cas majeur est celui d’une petite fille qu’on a sortie d’un mariage forcé et qu’on a mise à l’abri. Les cas de viols sont les plus récurrents. On a également plusieurs cas de viols collectifs qu’on ne rend pas publics en raison du choix de la victime. Elle décide de rendre son cas public ou pas.

Les violeurs en série sont-ils légion en Côte d’ivoire, d’après votre expérience de terrain ?

Les violeurs en série, il y en a plein. L’année dernière, on a eu un pédocriminel en série. On a pu le faire mettre derrière les barreaux grâce aux vidéos de ses ébats avec des enfants. Etant donné que ces cas ne sont pas très médiatisés, on croit qu’il n’y en a pas ici ou que ce sont des cas isolés. Mais il y en a à profusion.

Existe-t-il un profil type de femmes violées ?

Il n’y a pas de profil type de femmes sujettes au viol. Toutes les femmes, qu’elles soient issues d’un milieu aisé ou défavorisé peuvent subir un viol. On viole même des enfants. En fait, j’insiste sur la définition du viol. C’est l’absence de consentement dans l’acte sexuel. Une femme au foyer peut être victime de viol. Dès lors que la femme dit non et que le monsieur insiste, c’est du viol. C’est cela le viol conjugal.

Qu’en est-il du profil des violeurs ?

Le profil type de violeur varie. Ça peut aller du cadre d’entreprise, au jeune étudiant, ou même à l’élève. Ça peut même être un homme religieux. Il n’y a pas de profil type des violeurs, en fait. Tout le monde peut être un violeur, tout le monde peut être victime de viol.

Quelle est la moyenne d’âge des femmes victimes de viols en Côte d’Ivoire ?

La moyenne d’âge des filles victimes de viols en Côte d’ivoire oscille entre 2 et 70 ans. Du moins, chez nous à la Ligue. Nous avons eu le cas d’une mamie qui a été violée.

Avez-vous des chiffres précis ?

En Côte d’ivoire, on n’a pas de statistiques. Nous nous y attellerons très prochainement. Mais sachez que les femmes sont violées à tous les âges.

Quel est le niveau d’implication des parents dans ces viols ?

Généralement, les parents ont tendance à régler les cas de viol sous le prisme de l’honneur, de l’image de la famille qui est bafouée. Pour une femme qui est victime de viol, son premier reflexe n’est pas de faire emprisonner son violeur mais de penser à elle-même. Elle veut entrer dans une salle de bain et prendre sa douche parce qu’on a l’impression d’être sale, après un viol. Et cette sensation, elle reste longtemps lorsqu’un travail n’est pas fait.

Quid de l’inceste ?

Ce sujet est tabou. Mais il existe bel et bien. On a recensé plusieurs cas d’inceste, le plus retentissant étant celui de Bingerville. Où un homme a été accusé d’avoir violé la fille de sa conjointe.

La présidente de la Ligue, par exemple, a été victime d’inceste dans son enfance. Généralement, on règle ça par des sacrifices, on ne veut pas que ça sorte de la famille, mais c’est une question prégnante dans notre société. C’est ce que nous essayons de déconstruire à la Ligue.…suite de l'article sur nordsud.info