Princesse, jeune réfugiée du Liberia, violée un "couteau sous la gorge" à Abidjan
Princesse, jeune réfugiée libérienne, aux cheveux retenus dans une multitude de petites tresses, peine encore à parler de son viol à Abidjan. Son regard est effrayé: "J'ai cru qu'il allait me tuer" quand "il a posé son couteau sous ma gorge".
Comme dans la plupart des grandes métropoles d'Afrique de l'Ouest, le fléau du viol et des violences sexuelles commises sur des femmes, adolescentes et même des enfants n'épargne pas Abidjan.
La famille de Princesse s'est installée en Côte d'Ivoire en 2000 alors que son pays sortait progressivement d'une sanglante guerre civile.
Aujourd'hui, Princesse, 17 ans, est venue avec son père James, la quarantaine, et sa cousine Grace, 15 ans, - handicapée moteur, qui a accouché d'un enfant à la suite d'un viol collectif à Abidjan en 2012 -, dans les locaux d'une association d'aide aux victimes.
Situés dans le quartier Riviera d'Abidjan, les locaux de cette association sont cachés derrière de hauts murs d'enceinte. La cour de l'établissement est surveillée par des gardiens, somnolant à l'ombre de murs salis.
Dans ce centre, des femmes ou des adolescentes, victimes de violences, viennent demander de l'aide.
Leurs mots, à peine audibles, sont comme des souffles arrachés à leur mémoire, et leur regard, fatigué, semble dépossédé de toute perspective d'une vie heureuse.
Dans son bureau au décor rudimentaire, composé d'un vieux lit métallique jauni par les années, un paravent comme dernier rempart d'une intimité blessée, et des chaises d'un autre âge, le docteur Evariste Zana, confie que la tache est rude, et l'absence de moyens criante.
"Nous nous occupons, dit-il, de la santé des personnes les plus défavorisée, et des femmes victimes de violence sexuelles".
Ce médecin généraliste qui travaille dans le cadre du programme ASAPSU - Association de soutien à l'Autopromotion sanitaire et urbaine - financé par l'Unicef, confie que le "pire cas" qu'il a traité, était celui "d'une femme de 40 ans, également réfugiée", violée "alors quelle était dans le coma" à Abidjan.
- "Pas facile"-
Vêtue d'une petite robe à carreaux et de sandalettes en plastique, Stéphanie Yéo, assure la prise en charge psychologique des victimes, et dénonce "le manque d'éducation" face "au fléau du viol".
"Nous avons ici des enfants violés, des femmes battues, ce n'est pas un sujet facile à aborder ici", dit-elle.
Parmi les victimes de viols, selon elle, "il y a beaucoup de femmes qui viennent du Congo, Liberia, Rwanda, Sierra Leone, et même d'Afghanistan" vivant dans des conditions difficiles.
Elle se souvient aussi du "cas d'un enfant du nord du pays, de 4 ans, sodomisé par son grand-père" par "fétichisme". Pour expliquer l?injustifiable, "il s'était dit qu'en violant un enfant il allait augmenter ses richesses".
"Le viol reste un tabou dans notre société, on n'en parle pas, et nous ne sommes pas éduqués pour dire "on ne viole pas" ", dit-elle.
Abondant dans ce sens, le porte-parole de l'UNICEF en Côte d'Ivoire, Louis Vigneault-Dubois, dénonce une banalisation de la violence sexuelle, notamment dans le milieu scolaire.
"46% des enseignants, selon une étude, ont admis avoir eu des rapports sexuels avec des élèves, un chiffre inquiétant mettant en exergue la vulnérabilité des jeunes filles à l'école".
Selon lui, "le fléau du viol s'inscrit avec en toile de fond un effritement social, les enfants et les femmes se retrouvent au bas de l'échelle sociale, et sont exposés à toutes les formes de violence, et n'ont pas assez confiance pour dénoncer ce qu'ils subissent".
- "emmenée dans un garage" -
Les autorités, quant à elles, ont commencé à développer un code de conduite pour les enseignants en vue de mettre fin à l'impunité.
"Des lignes d'écoute ont été mises en place pour les victimes, mais face à l'ampleur de ce problème, on a besoin d'actions plus musclées", souligne le porte- parole de l'Unicef.
Assise face à des images de la Vierge Marie, Princesse raconte son viol récent, avec de longues plages de silence.
"C'était un lundi, j'étais toute seule dans la rue, j'allais à l'église. Il m'a attrapée. Il m'a emmenée dans un garage. Il a mis un couteau sous ma gorge, et il m'a violée. Et il m'a abandonnée là. J'ai cru qu'il allait me tuer" .
Le père de Princesse fixe sa fille, avant de répéter plusieurs fois: "Elle ne s'en remettra jamais".
Source : fr.news.yahoo.com
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