En Côte d`Ivoire, un syndicat pour défendre les travailleuses
Un syndicat de femmes a été créé pour que leurs préoccupations soient véritablement prises en compte. Depuis l’indépendance du pays, en 1960, aucune femme n’a jamais été à la tête d’un syndicat.
C’est une première en Côte d’Ivoire. Des « femmes travailleuses » de l’administration, du milieu agricole et du secteur informel ont créé leur syndicat, pour que leurs préoccupations soient véritablement prises en compte. Le nouveau syndicat revendique 4 000 adhérentes, des enseignantes, sociologues, vendeuses sur les marchés, pompistes, transporteuses… qui ambitionnent de devenir les « interlocutrices importantes dans le milieu syndical en Côte d’Ivoire », dominé par des hommes qui décident à leur place. Le Réseau des femmes syndicalistes de Côte d’Ivoire (REFSY-CI) est né « pour porter haut nos préoccupations auprès des pouvoirs publics », a expliqué à l’AFP sa présidente, Mariatou Guiehoa, qui estime qu’elles ont été jusqu’ici « reléguées au second plan ». Pour Mme Guiehoa, 65 ans, dont trente de militantisme, depuis l’indépendance du pays, en 1960, seuls « des strapontins » ont été accordés aux femmes dans les mouvements syndicaux. Aucune femme n’a jamais été à la tête d’un syndicat.
Les syndicats établis méfiants
Transfuges de cinq centrales syndicales ivoiriennes, les cadres du REFSY-CI ont décidé de constituer un « syndicat libre et indépendant pour les femmes », avec pour devise: « Amour Solidarité Justice ». L’arrivée de ce nouveau syndicat a été saluée par la ministre de la femme, de la protection de l’enfant et de la solidarité, Mariatou Koné, qui évoque « une avancée dans la politique de promotion de la femme ». Mais les syndicats établis voient cette nouvelle concurrence d’un autre œil, mettant en garde contre le danger de « sectarisme » qui pourrait réduire à néant les ambitions du REFSY-CI.
« Nous reconnaissons qu’il y a des obstacles à lever, comme le sexisme, le machisme et la phallocratie qui sont des réalités dans le mouvement. Mais cela ne devrait pas amener les femmes à se sectoriser », juge Théodore Gnagna Zadi, président de la Plate-forme nationale, qui regroupe une cinquantaine de syndicats de fonctionnaires, à l’origine d’une grève d’un mois qui secoué le pays en 2017. « Le mouvement syndical n’est pas un mouvement de complaisance où l’on donnerait des places à des femmes parce qu’elles sont femmes. Elles doivent le mériter », ajoute-t-il.
Un défi que les membres du REFSY-CI disent être prêtes à relever : « Nous ne sommes pas là pour dire que nous voulons prendre la place des hommes. Le REFSY-CI veut mériter sa place dans le milieu syndical », dit le programme du nouveau mouvement. Avec comme priorité la formation de ses adhérentes au militantisme féminin, avec l’aide de la fondation allemande Friedrich Herbert-Stiftung. Et le souci de « concilier le mouvement syndical et la vie de foyer, deux choses différentes ».
Le REFSY-CI, qui a constaté que la quasi-totalité de ses adhérentes ne disposaient pas de couverture maladie, entend aussi se lancer dans cette lutte. « Les artisanes, les femmes rurales vivent au jour le jour. Si pour des raisons de maladie, elles n’ont pu bénéficier de soins, elle ne peuvent générer des ressources », déplore Salimata Porquet, présidente de la Plate-forme d’éveil électoral des femmes et des jeunes, une ONG panafricaine, marraine du réseau.
Source : AFP
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