Du mariage arrangé au mariage forcé
Forcé ou arrangé, le mariage a été prévu par d’autres mais sur qui porte le poids de ce mariage et qui a le pouvoir de décision ?
Essayons d’abord de comprendre pourquoi les mariages ont été et peuvent encore être arrangés.
Des raisons économiques et politiques rentrent sans aucun doute en jeu. Ainsi, au Moyen-Age, le mariage entre fils et fille de deux seigneuries pouvait constituer une alliance qui renforçait le pouvoir des deux familles sur une région, et permettait de préserver un lignage, de transmettre un patrimoine. Par ailleurs, la dot (argent ou terre donnés par le père de la femme à la famille du marié) transformait l’épouse en une précieuse valeur marchande.
L’arrangement du mariage peut aussi venir sceller un pacte pour conserver, préserver et transmettre les coutumes et les valeurs qui lient une communauté. Par exemple, en Inde, le mariage prolonge cette tradition : la société étant organisée en castes, ce sont les parents des mariés qui organisent le mariage pour qu’il reste dans la même caste. Parfois, les époux ne se rencontrent pas avant le jour de la cérémonie !
Les conditions qui entraînent un mariage arrangé se retrouvent également dans le mariage forcé, mais la différence tient à une notion de contrainte, certes physique, mais aussi psychologique : c’est le poids de l’environnement, et notamment familial, qui renforce la pression sur les personnes concernées. D’ailleurs, on peut se demander sur qui s’étend ce forçage.
Quand il est imposé à un enfant, son choix et son indépendance individuelle disparaissent. Celui-ci devient le simple agent du désir familial sans qu’il ait son mot à dire. Mais ce mariage qui peut apparaître comme une violence faite par les parents et la famille n’est-il pas aussi imposé à ces derniers ? En effet, la peur de perdre ses racines peut être à l’origine de l’arrangement du mariage, et de l’obligation de s’y soumettre. Ainsi, des parents exilés peuvent se sentir obligés de suivre à la lettre, et selon la tradition la plus stricte, les coutumes de mariage car toute déviation équivaut à une trahison sans nom vis-à-vis de la terre d’origine. L’enfant peut lui se sentir prisonnier d’une idéologie et d’une culture qui n’est plus la sienne et qui lui paraît arbitraire.
Dans le mariage forcé, c’est donc la contrainte au sens large qui prime sur l’arrangement.
Un mariage arrangé peut être supporté : des parents qui ne se sont pas choisis mais qui forment un couple stable, peuvent, par exemple, servir de modèles et aider à accepter un mariage arrangé. Par contre, bien souvent, le mariage forcé reste intolérable. La personne est victime de violences physiques, d’une privation de ses droits. Le mariage forcé rentre alors dans le cadre d’une violence faite à autrui, d’une restriction de ses libertés individuelles et il devient contraire aux Droits de l’Homme. Et parfois, les normes familiales, voire nationales, se trouvent être en contradiction avec celles internationales. C’est alors un abîme qui se crée entre parents et enfants, écartelés entre deux cultures auxquelles ils ne peuvent renoncer.
Florence Bayala
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