Que dit le droit ivoirien au sujet des avantages et les inconvénients du concubinage?
Dans ce billet, nous ferons un tour d’horizon autour de certaines questions régulièrement posées en matière de concubinage.
1- A-t-on intérêt à vivre en concubinage ?
L’union libre ou concubinage qui est l’état de deux personnes qui vivent ensemble sans être légalement mariées n’est pas sans présenter quelques avantages.
Le premier avantage consiste dans l’absence de toute formalité quant à la constitution de l’union libre. Aucune célébration n’est nécessaire. Il suffit que le concubinage présente une certaine stabilité, et une certaine durée susceptible de la distinguer des liaisons passagères.
De même, la cessation de l’union n’est soumise à aucune condition. Les concubins peuvent mettre fin à leur union par le seul fait de leur volonté.
Mais à côté de ces quelques avantages, l’union libre présente de graves inconvénients.
- Au cours du concubinage, les concubins ne sont tenus d’aucun devoir l’un envers l’autre : ni devoir de fidélité, ni devoir de secours ou d’assistance.
- En cas de décès d’un concubin, l’autre n’a aucune vocation successorale. En l’absence de testament, le concubin n’hérite pas de son concubin décédé.
- En l’absence de tout lien légal entre les concubins, la liquidation des intérêts communs ayant pu exister entre eux se fera le plus souvent selon les règles de la liquidation d’une société de fait.
2- Deux concubins sont-ils liés par l’engagement pris par l’un d’eux vis-à-vis de tiers ?
En principe, le concubin n’est pas concerné par l’engagement pris par l’un des deux vis-à-vis de tiers en raison de l’absence d’un lien de droit entre les concubins.
Ce principe connaît une exception : le concubin peut être tenu par l’engagement souscrit par l’autre lorsque le tiers qui a contracté avec l’autre concubin a pu croire de bonne foi à l’existence d’un mariage régulier.
Il y a là une application de la théorie de l’apparence. La jurisprudence sanctionne les concubins qui ont créé une fausse apparence de mariage.
Le tiers peut alors engager une action contre l’autre concubin.
3- L’époux divorcé qui vit en concubinage perd-il tout droit a la pension alimentaire ?
La pension alimentaire versée par l’époux fautif à l’époux innocent est révocable lorsqu’elle cesse d’être nécessaire. Il est évident que la pension alimentaire cesse d’être nécessaire en cas de remariage. En effet, ce nouveau mariage fait naître une obligation de secours qui rend inutile le versement de la pension alimentaire.
Cette solution doit également être prônée en cas de concubinage notoire du conjoint créancier de la pension alimentaire.
En dépit de l’inexistence du devoir de secours en matière de concubinage, la communauté de vie et d’intérêts existant entre les concubins rend inutile la pension alimentaire.
Par conséquent, l’époux divorcé qui vit en concubinage notoire devrait perdre tout droit à la pension alimentaire dès lors que l’époux débiteur de la pension aura apporté la preuve du concubinage et aura démontré le caractère inutile de la pension dans cette hypothèse.
Voir C. Civ. Art. 27 L. n° 64-376 du 7/10/64.
Quelle est la situation des enfants des concubins ?
Les enfants des concubins sont des enfants naturels. Mais ils peuvent être soit des enfants naturels simples soit des enfants naturels adultérins.
-- Ils sont des enfants naturels simples lorsqu’aucun des concubins n’est lié par un mariage avec une autre personne. Dans cette hypothèse, la filiation des enfants des concubins est établie soit par reconnaissance volontaire soit par déclaration judiciaire à la suite d’une action en recherche de paternité ou de maternité.
-- Ils sont des enfants naturels adultérins lorsque l’un des concubins est déjà marié. S’il s'agit d’un enfant adultérin a patre (par le père) sa filiation ne pourra être valablement établie par reconnaissance à l’égard de son père que si celui-ci obtient le consentement de son épouse ou si la reconnaissance a été faite alors qu’une procédure de divorce avait été engagée.
De même, l’enfant adultérin a matre (par la mère) ne peut être reconnu par le concubin de sa mère qu’après une action en désaveu intentée par le mari de sa mère.
Mais qu’il soit enfant naturel simple ou adultérin, l’enfant né d’un concubinage acquiert le nom de celui de ses deux parents à l’égard de qui sa filiation est établie en premier lieu.
Si sa filiation est établie simultanément à l’égard de l’un et de l’autre, l’enfant naturel acquiert le nom du père. La puissance paternelle est exercée par celui des père et mère qui l’a volontairement reconnu s’il n’a été reconnu que par l’un d’eux. Si l’un et l’autre l’ont reconnu, la puissance paternelle est exercée par le père.
Voir C. Civ. Art. 21, 22 L. n° 64-377 du 7/10/64.
5- En cas d’accident, le survivant de deux concubins peut-il prétendre à des dommages-intérêts ?
En cas de décès d’un concubin, il n’est prévu au regard des textes, aucune indemnisation du concubin survivant ; Les dispositions légales notamment celles du code CIMA ne prévoient que l’indemnisation du conjoint survivant, des enfants, qu’ils soient mineurs ou majeurs, des ascendants, des frères et sœurs de la victime décédée.
V. Art. 229, 265, 266 du Code CIMA.
6- En cas de décès, le concubin survivant a-t-il droit au maintien dans les lieux d’habitation loués ?
En l’absence de toute disposition légale, le concubin survivant ne peut bénéficier en droit ivoirien d’un droit au maintien dans les lieux d'habitation. Ce droit au maintien dans les lieux loués n’existe même pas au profit du conjoint, vivant effectivement avec le défunt si celui-ci n’est pas partie au contrat de bail, il ne peut alors exister au profit du concubin.
7- Quelles peuvent être les conséquences de la rupture du concubinage ?
Deux hypothèses doivent être envisagées :
-- La rupture du concubinage par le décès d’un concubin
Le concubin survivant n’a aucun droit successoral en l’absence testament. (Voir Question n° 8)
La liquidation de la communauté ayant existé entre les concubins se fera selon les règles de la liquidation d’une société de fait.
-- La rupture du concubinage par la volonté des concubins
Le principe est celui de la liberté de rupture du concubinage.
Chacun des concubins peut à tout moment reprendre sa liberté et abandonner l’ autre.
Par conséquent, la rupture du concubinage ne peut, à elle seule, justifier une demande en dommages-intérêts de la part du concubin abandonné.
Mais exceptionnellement, celui des concubins qui a pris l’initiative de la rupture peut être condamné à des dommages-intérêts si la rupture a été fautive.
Cette faute peut être relevée dans les circonstances de la rupture comme en matière de fiançailles.
Mais elle peut également résider dans des agissements bien antérieurs tels que la séduction dolosive qui a été à l’origine du concubinage.
8- Quels sont les droits successoraux des concubins ?
En ce qui concerne les droits de succession, le concubin est considéré comme étranger vis-à-vis de la succession de son concubin en l’absence d’un lien de droit existant entre eux. Les concubins n’ont aucune vocation successorale l’un dans la succession de l’autre.
Cependant, un concubin peut pallier l’absence de droit successoral de son concubin en rédigeant un testament ou en effectuant des libéralités en sa faveur.
Ce testament ou ces libéralités sont aujourd’hui reconnus comme valables lorsqu’ils ont pour objet de réparer le préjudice résultant de la rupture du concubinage ou d’assurer, après rupture, l’avenir du concubin abandonné.
En revanche, lorsque la libéralité a été faite en vue d’amener la conclusion ou la continuation du concubinage (en d’autres termes, qu’elle a pour objet d’acheter le consentement du concubin à l’établissement ou au maintien du concubinage) la libéralité sera nulle pour cause immorale. Le mariage polygamique est un mariage nul. Les personnes qui ont conclu un tel mariage seront considérées comme de simples concubins.
Voir C Civ. Art. 2, 31 L. n° 64-375 du 7/10/64.
Source : Etude de Me Stéphane RICHMOND
Successeur de l'Etude Me Marcelle DENISE-RICHMOND
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