9 mauvaises raisons pour lesquelles une femme négocie moins son salaire

Sur une carrière entière, les femmes les plus diplômées sont moins rémunérées que leurs collègues masculins !* Et quand la dernière étude salaires du cabinet Robert Walters nous apprend que 52 % des femmes osent négocier une augmentation contre 63% des hommes*, on se dit que ça fait cher l’humilité ! Pour changer la donne, voici comment se sortir de la tête les fausses bonnes raisons qui freinent (voire bloquent) les femmes dans les négociations salariales.

J’ai envie d’être reconnue pour mon boulot

Je bosse bien (voire mieux que les autres) donc je vais être augmentée. Perdu ! Ce ne sont pas les règles du jeu en entreprise. « Augmentations de salaire et promotions n’arrivent pas automatiquement comme les bonnes notes à l’école, quand on a bien travaillé… observe Laurence Dejouany, déléguée de la présidente du Cercle Interelles. à l’intérieur d’une enveloppe budgétaire contrainte, le manager a tendance à donner en priorité à ceux qui demandent. Les femmes demandent peu, elles ont peu, pendant que les hommes négocient pied à pied leurs augmentations, creusant ainsi les écarts avec les femmes ».

Je ne maitrise pas encore 100 % du poste visé

Et alors, où est le problème ? Vous êtes là, victime du syndrome de l’imposteur. « Les femmes se sentent davantage illégitimes que les hommes. Bilan, elles estiment avoir besoin de prouver 100 %, voire plus, de leurs compétences et de leurs performances pour s’autoriser à négocier une augmentation », souligne Anne-Laure Guihéneuf, responsable du pôle Rn’B (Research & Business) au sein d’Audencia. Erreur fatale. Pendant que vous tergiversez, les hommes (oui cela peut paraître caricatural, mais parfois il faut forcer le trait pour faire changer les choses) montent au créneau. Compétents ou pas, peu leur importe en fait, ils y croient. Cette foi explique que 52% des femmes osent négocier une augmentation contre 63% des hommes, comme le rappelle la dernière étude salaires 2020 du cabinet Robert Walters.

Je ne le mérite pas vraiment, c’est un travail d’équipe

OK, c’est certes un travail d’équipe mais dans cette équipe, vous autant que les autres, avez pris part à la réussite de la mission, du projet, à la surperformance… Donc, vous le valez bien aussi. « Les femmes diront « nous » quand les hommes disent souvent « je ». Elles trouveront inutile de perdre du temps à réseauter dans les couloirs ou en fin de journée, elles attendront qu’on leur octroie argent ou promotion récompensant leur juste valeur plutôt que de demander. Et cela ne marche pas… », ajoute Laurence Dejouany, auteure de d’un ouvrage intitulé Les femmes au piège de la négociation salariale ou Comment demander de l’argent à son patron sans le fâcher… (L’Harmattan).

Pour moi, parler d’argent, c’est déplacé !

Et pourquoi pas vulgaire tant qu’on y est ! La dimension du don et du dévouement a été transmise à certaines femmes à travers leur « rôle féminin » qui pourrait se résumer ainsi : « La femme donne la vie, l’homme la gagne ». Sauf que les temps ont changé. « Ce souci des autres, il faut se l’appliquer aussi à soi-même. Si nous mettons beaucoup de générosité dans notre travail, c’est précieux. Notre travail n’en a que plus de prix. N’oublions jamais que nous travaillons pour gagner notre vie. Et c’est une cause tout à fait honorable, dont les hommes par contre se valorisent. Pourquoi pas nous ? », insiste Laurence Dejouany. « Certaines femmes ont le sentiment de devoir se vendre à tout prix. Certaines vont même jusqu’à dire qu’elles ont l’impression d’aller se prostituer en demandant de l’argent », ajoute Anne-Laure Guihéneuf.

Mon manager va refuser

« Effectivement, les experts en recrutement se disent que lorsqu’ils reçoivent une femme en entretien, elle ne va pas chercher à négocier. Donc consciemment ou pas, ils ne lui laissent pas l’espace et/ou le temps pour le faire. Pour un homme, ils vont limite lui tendre la perche pour amorcer la négociation », constate Isabelle Barth, experte du management de la diversité, engagée pour l’égalité professionnelle homme/femme, professeur en sciences de gestion et directrice de la recherche à l’Inseec U Paris.

Je n’ai pas envie de prendre la part des autres

Votre boss vous rabâche à longueur de journée que les temps sont durs, la concurrence impitoyable, l’enveloppe des augmentations réduite à peau de chagrin, et vous êtes obligée d’écouter son bla-bla. Et, avant même que vous ayez pu demander un kopek, son discours ambiant finit pas vous convaincre que finalement, d’autres collaborateurs méritent peut-être plus que vous d’être augmentés. Bullshit ! « Vous n’enlevez rien aux autres. C’est le problème de votre manager de répartir en toute équité l’enveloppe à sa disposition, sans jamais oublier non plus de faire preuve d’équité à votre égard, compte tenu de vos performances », revendique Laurence Dejouany.

Je ne sais même pas à quoi j’ai droit

Eh oui, à force de faire plus que correctement votre boulot, le nez dans le guidon, vous en oubliez jusqu’à votre propre valeur. Donc renseignez-vous sur ce que gagnent les autres et notamment les hommes. Pour certains d’entre eux (pas tous, bien sûr), c’est un motif de fierté de gagner un max, donc ils en parlent en général plus librement que les femmes. Si vous n’osez pas (et pourtant c’est ce qui le plus efficace) ou s’ils refusent de causer, demandez-leur simplement ce qu’ils pensent de votre rémunération et faites-vous conseillez sur ce que vous pouvez demander. Vous risquez d’être surprise !

J’ai déjà décroché un temps partiel, je ne vais pas abuser

Les femmes se sentent d’autant moins légitimes à demander argent ou promotion quand elles sont mères. Du coup, à la trentaine les écarts se creusent entre hommes et femmes. Or, « gérer son équilibre de vie par un temps partiel est productif pour votre entreprise et vous en payez le prix par votre salaire partiel. Cela ne doit donc pas impacter votre augmentation de salaire. Freiner votre progression salariale serait payer votre temps partiel une deuxième fois », insiste Laurence Dejouany. Donc stop à l’auto pénalisation !

Dans ma boîte, c’est silence radio sur l’égalité femmes-hommes

C’est un fait, malgré les différentes lois sur l’égalité au travail, certains employeurs se montrent très peu diserts sur le sujet. Une stratégie parfois délibérée selon Anne-Laure Guihéneuf, « en laissant penser que le terrain n’est pas favorable à l’égalité entre les femmes et les hommes, cela dissuade les femmes d’aller négocier. Préciser par exemple que l’entretien annuel n’est pas le lieu propice pour parler salaire, c’est déjà entretenir l’opacité sur le sujet. Cela revient à laisser penser, notamment aux femmes, qu’il n’y a pas de moment pour parler salaire ».