Bazem`se, le styliste burkinabé qui révolutionne le ``Kôkô Dunda``
Fondateur de “Kôkô Dunda”, Bazemo Sébastien, connu sous le nom Bazem'se, est créateur, styliste et modéliste qui a fait ses premiers pas en Côte d’Ivoire avant de s’installer au Burkina Faso, son pays natal.
Fleuron de la haute couture africaine et singulièrement burkinabè, Bazem'se est un Dandy, friant du beau empreint de courtoisie et de délicatesse. Des atouts grâce auxquels il a, avec maestria, donné au pagne “Kôkô Dunda”, ce pagne autrefois réservé aux femmes défavorisées, ses lettres de noblesse au 18e Kundé d’Or à travers des prestigieuses tenues de soirée arborées par des mannequins, femmes et hommes, au grand bonheur des convives. Ensemble, découvrons ce talentueux créateur.
- Si on vous demandait de vous décrire, que diriez-vous?
Il est quand même délicat de s'auto décrire de peur de tomber dans l'exubérance.Toutefois et bien entendu pour le besoin de la circonstance, nous allons nous y mettre. Alors, si on devait me décrire, je dirais juste que je suis Bazem'se.
- Oui le fondateur mais ça a pris tout Abidjan disons d’abord tout Ouaga… Qu’en pensez-vous?
J’ai ouï dire cela, et comprenez déjà que pour moi, c’est une fierté et une satisfaction personnelle. Parce que souvent, nous créateurs, on crée avant tout pour le bonheur des autres, leur bien-être, mais également pour faire plaisir à tous ceux qui ont un penchant pour le style, la mode et le vêtement de qualité. Déjà, quand tu crées et que tout le monde est heureux de ce que tu fais, c’est déjà la satisfaction morale et le plaisir que tu recherchais. Forcément, il ne faut pas occulter le côté financier qui, somme toute, est aussi important même si ce n’est pas du premier chef ce qui prime.
Mais en même temps, il n’y a rien de plus plaisant que de savoir que tout le monde aime ce que tu fais; tout le monde a l’oreille toujours tendue pour entendre ce qui va se passer ou a toujours les yeux attentionnés, des yeux qui furètent ce que tu vas leur montrer. Ou encore ce que tu mijotes à leur faire vivre à nouveau.
Il faut donc dire que c’est un plaisir déjà de savoir que le KôKô dunda aujourd’hui, que ce soit les ivoiriens ou les burkinabés, tout le monde en raffole. Pour moi c’est un grand plaisir et je dirai mieux, c’est un gros coup que j’ai marqué.
- Il y a une innovation, me semble-t-il, le “KôKô dunda” est maintenant en soie…?
Oui, ça c’est la dernière surprise qu’il fallait. C’est ce que je dis, pour moi le kundé, est un événement majeur au Burkina Faso et toutes les femmes, elles adorent être élégantes.
- Comment vous est venue l’idée de le transformer en soie?
Il est quasiment impossible, de nos jours, de voir une femme élégante qui, dans sa garde-robe, n’a pas un vêtement en soie. Moi je me suis dit, mais tiens, voilà un événement, les kundé, une véritable opportunité au cours de laquelle toutes les femmes adorent être glamour, classiques et bien habillées. Pourquoi ne pas leur proposer la soie avec mes teinturières, je me suis dit.
Et pour le reste, je n’ai fait que donner juste une couleur qu’il fallait voir. La question à laquelle il fallait répondre en ce moment-là fut: est ce que cela peut s’y accommoder? Pour la suite, j’admets, vraisemblablement, que les gens ne s’y attendaient pas. Et contre toute attente, le résultat attendu a été probant, révélateur et honorable. L’occasion était donc toute trouvée pour dire, “bon d’accord”, on va faire l’inauguration.
Nous avons tout mis en oeuvre pour que pour que la production se fasse localement, ici à Bobo Dioulasso. Mais la particularité, c’est qu’on fera le “Kôkô dunda” en soie made in Burkina Faso et non la soie venue de la Chine. Et parce qu’on est contre ce qui vient de la Chine, qu’on préfère faire travailler nos mamans et nos soeurs, rien n’est venu de la Chine. Autant faire la promotion de nos produits, même s’il est vrai que la matière première qui est la soie, on l’a faite venir de l’Inde. Mais après, tout ce qui est transformation, la teinture et autre, tout est fait à Bobo Dioulasso.
- Et pensez-vous que les femmes ont aimé?
Je puis vous dire, allègrement, que les sollicitations et les renseignements relatifs à cette innovation vont bon train. Depuis matin, mon téléphone n’arrête pas de sonner et pas qu’à Ouaga. En somme, Il y a un très bon retour auquel je ne m’attendais franchement pas.
Les appels viennent de partout, du Gabon, de la Côte d’Ivoire..., tout le monde veut déjà les robes et me demande si c’est en vente. Je leur dis simplement non, pas pour le moment, mais ce sera en vente bientôt et on le dira. Ce qui fait que depuis matin mon téléphone ne fait que sonner. Pour moi déjà, il faut dire que c’est un pas de gagner.
- La dernière collection s’intitule ‘’Barka’’, pourquoi?
Avant de parler de “Barka”, parlons de reconnaissance et de gratitude. Et Louis-Auguste Martin, parlant de reconnaissance, a dit: “L'étalage d'un bienfait en ravit tout le mérite; il dispense de la reconnaissance, car il paie son auteur en devenant pour lui un moyen d'ostentation, et il serait mal venu s'il se plaignait de l'ingratitude de son obligé.” Et moi, je veux être reconnaissant et ne pas occulter l’effort de ces braves femmes du Burkina.
Raison pour laquelle ‘’Barka’’, pour moi, est avant tout une oeuvre de gratitude. C’était pour remercier toutes ces femmes, notamment nos mamans qui déjà, depuis des années, ont travaillé ce pagne. Rien, absolument rien n’a altéré leur détermination, encore moins leur ardeur à la tâche. Elles n’ont pas perdu d’espoir malgré les maigres moyens, les maigres revenus qu’elles y gagnaient. Elles ont plutôt gardé ce plaisir de le fabriquer jusqu'à aujourd'hui. Moi j’ai voulu leur donner un coup de pouce dans leur commerce. Et sans faux fuyant, je peux dire que je suis fier d’elles parce que ce sont des femmes battantes. Si j’ai la possibilité, aujourd’hui, de les élever encore plus loin, ce serait pour moi juste ma modeste façon de leur dire merci.
- Que pensez-vous du prêt-à-porter?
Le prêt-à-porter africain a de l’avenir. Et c’est pour moi un atout majeur pour lequel je penche et dont je désire profiter vraiment. je suis beaucoup pour parce que là, aujourd’hui, c’est ce qui marche facilement chez moi, et j’essaie d’en faire beaucoup puisque je ne suis plus disponible à créer pour une cliente étant donné que cette cliente est de passage. En revanche, je suis plus pour créer et déposer en boutique et que ça parte comme des petits pains. C’est plus avantageux pour moi que de toujours attendre la clientèle venir à moi, avant de produire.
Je préfère, et cela va soi, quand c’est le prêt-à-porter. Et si nous les africains avons cette possibilité de miser plus dans le prêt-à-porter, de faire travailler plus dans le prêt-à-porter, ce serait très intéressant pour nous. En aval, avec cette concrétisation nos soeurs seront les premières bénéficiaires. Elles seront emmenées, si bien sure les uns et les autres y mettent beaucoup plus de sérieux et de qualité, de ne plus forcément aller en Europe, dans d’autres pays aller chercher de la qualité mais, plutôt porter les créations de nos créateurs. Je pense que c’est ce qui va faire booster l’économie de nos pays, et même de l’Afrique.
- Comment, d’ici à trois ans, appréhendez-vous votre structure?
Comme le dise les anglais, “The sky is a limit”, autrement dit, le ciel est la limite. Je la vois encore plus grandiose. Pour l’instant, la primeur est à la fondation, la mienne, que nous sommes en train de créer. A terme, elle servira à produire tout ce qui est “Kôkô dunda” parce qu’on veut faire dans l’exportation. Ces derniers temps, des voyages a-propos s’offrent à moi. Ce sont par exemple des départs sur le Portugal et les Etats-Unis, rien que pour montrer et faire connaître le tissu, ce que nous confectionnons en Afrique. Et je crois que ça commence à intéresser même l’occident.
- Vos relations avec les autres stylistes burkinabés?
Mes relations avec les stylistes burkinabés sont au beau fixes, très bonnes et je m’entends avec eux tous. On est entrain de mettre en place une association parce que nous nous sommes rendus compte qu’il y avait beaucoup d’associations ici. Nous sommes à pied d’oeuvre pour la création d’une association comme en Côte d’Ivoire, l’association des professionnels de la mode. Et nous sommes à l'étape du récépissé. Je pense donc que notre Assemblée Générale sera dans la période de Bobo Fashion. C’est mon événement que j’organise dans le mois de juin. Donc ce jour-là, il y aura L’AG au cours de laquelle nous formerons le bureau général de l’association pour qu’on puisse travailler ensemble. Aujourd’hui, il est impossible de travailler individuellement, l'idéal et le mieux est de travailler ensemble et à l’unisson, car ensemble on devient plus fort.
- Avez-vous des conseils pour vos petits frères qui viennent de commencer dans le métier de la mode?
Je dis toujours qu’il y a de la place dans le milieu de la mode et je pense que chacun a son idée, sa créativité et à quelque chose à apporter à la mode. Donc aujourd’hui moi, je ne décourage pas un petit frère qui veut faire dans la mode. Au contraire, je les encourage. Mais quand on veut faire la mode, il faut que tu aies de la passion. Aujourd’hui la mode n’est pas qualifiée à l’école ou on disait c’est ‘’la série C’’ ou encore ‘’ tu n’as pas réussi à l’école, va à la mode’’. Non! Aujourd’hui il faut aimer, il faut être passionné de mode pour être dans la mode et quand on est passionné, tout glisse comme de l’eau de roche.
- Quelle est votre définition de la femme élégante?
Pour moi, c’est la femme qui sait déjà comment se tenir en public, qui sait s’habiller dans n’importe quelle circonstance, en réunion, en dîner ou au travail. Elle sait toujours les petits trucs. On n’exagère pas dans les couleurs, mais toujours le petit truc qui attire. Donc pas vulgaire mais très classe.
- On sait que Bazem’se a commencé en Côte d’Ivoire, c’est à quand votre défilé à Abidjan?
Je l’espère pour très bientôt. Déjà s’imposer un impératif en disant qu’il faut que j’ouvre une autre boutique en Côte d’Ivoire. Et c’est cela l’une des urgences dans mes projets. Parce que beaucoup d’ivoiriens me commandent des tenues et je sais. Ce serait alors intéressant que je songe à revenir sur la terre qui m’a vu naître et grandir. Parce que la Côte d’Ivoire, elle est tout pour moi, jusqu’aujourd’hui, je dis toujours merci à la Côte d’Ivoire car c’est elle qui m’a fait. Et aujourd’hui, je suis davantage fier d’elle.
- Votre dernier…
Je vous dis merci et également merci à tous ces internautes qui vous suivent sur votre site. Je dis encore merci et à très bientôt pour Bobo Fashion
Florence Bayala
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