Seize peines de mort pour le meurtre d’une jeune fille en Bangladesh

En avril dernier, le meurtre de Nusrat Jahan Rafi, 19 ans, par son professeur et ses camarades de classe, avait déclenché des manifestations à Dhaka. La jeune fille avait porté plainte pour harcèlement sexuel. Ce jeudi 24 octobre, la justice a condamné les seize accusés à mort.

La justice du Bangladesh a condamné à mort, ce jeudi 24 octobre, 16 personnes pour le meurtre d’une jeune femme de 19 ans, brûlée vive pour avoir porté plainte pour harcèlement sexuel contre le responsable de son école coranique.

La mort de Nusrat Jahan Rafi en avril avait suscité une vive émotion et déclenché des manifestations à travers cette nation d’Asie du Sud. Les 16 accusés, dont le professeur de la jeune fille et trois de ses camarades, étaient jugés depuis juin par un tribunal spécial du district de Feni (sud-est).

« Le verdict prouve qu’aucun meurtre ne reste impuni au Bangladesh. Nous avons l’état de droit », a déclaré le procureur Hafez Ahmed à la presse, une fois cette sentence prononcée dans une salle d’audience bondée et sous haute sécurité. La défense a annoncé son intention de faire appel.

Brûlée sur ordre du principal

Selon les autorités, la jeune femme a été attirée sur le toit d’une école coranique de Sonagazi où elle était élève. Ses assaillants lui ont alors demandé de retirer la plainte pour harcèlement sexuel qu’elle avait déposée peu avant contre le principal de l’établissement.

Face à son refus d’obtempérer, elle a été aspergée d’essence et mise à feu. Elle a succombé à ses blessures cinq jours plus tard, le 10 avril, provoquant un scandale dans ce pays de 160 millions d’habitants.

D’après la police, au moins cinq des accusés sont directement impliqués dans le meurtre, tandis que les autres sont poursuivis pour les avoir aidés.

Le principal de l’établissement est soupçonné d’avoir planifié ce meurtre depuis sa cellule, où il se trouvait après son arrestation consécutive à la plainte déposée contre lui pour harcèlement sexuel.

Des aveux contraints

« Le but était de déguiser l’affaire en suicide. Mais le plan a échoué car Rafi a réussi à descendre en feu du toit après que le foulard (avec lequel elle était ligotée, NDLR) a brûlé, libérant ses mains et pieds », déclarait récemment Mohammad Iqbal, le responsable de l’enquête.

Nusrat Jahan Rafi s’était rendue au commissariat fin mars pour porter plainte. Une vidéo montre le commissaire prenant sa déposition mais la qualifiant de « pas grand chose ».

Tous les accusés avaient plaidé non coupable à l’ouverture du procès. Huit d’entre eux ont déclaré au tribunal que les enquêteurs les avaient forcés à signer des procès-verbaux confessant leur implication dans le crime, certains faisant état de tortures.

Le Bangladesh en proie aux violences sexuelles

Mahmudul Hasan Noman, frère de la jeune femme décédée, a déclaré être satisfait de la décision de justice et a remercié la Première ministre Sheikh Hasina d’avoir accéléré la procédure dans ce dossier. « Nous voulons une exécution rapide du jugement », a-t-il ajouté.

Une association locale de défense des droits des femmes Bangladesh Mahila Parishad, qui avait suivi de près ce procès, a salué une « peine exemplaire », disant espérer qu’elle serait dissuasive sur fond d’augmentation des cas de viol et de harcèlement sexuel au Bangladesh. Selon le groupe, seules 3 % des affaires de viol aboutissent à des condamnations dans le pays.