J`ai tenté d`être la femme, mère et épouse parfaites que la société m`impose, mais voici pourquoi c`est une arnaque

Mais qui sont-elles, celles qui arrivent vraiment à tout faire?

‘’Je suis une éternelle optimiste. Depuis toujours, j'ai tendance à voir le verre à moitié plein, et quand bien même, je le trouverais un peu vide, je réfléchirais rapidement à des arguments pour remonter un peu le niveau. Dans ma vie de fille, de femme, j'ai toujours cru que je pourrais tout avoir: être femme, aimer et vivre ma vie amoureuse comme je l'entendais, avoir une vie personnelle riche de temps pour moi et de sorties entre amis, être une "working girl", faire des études, travailler, poursuivre une carrière qui m'exalterait, être mère aussi, porter et élever mes enfants, être près d'eux quand ils en ont besoin...

Au final, c'est ce que la société, notre culture, nous promet à nous toutes, femmes. Mais qui sont-elles, celles qui arrivent vraiment à tout faire? De mon côté, j'ai l'impression aujourd'hui, qu'on m'a menti pendant toutes ces années. C'est un peu comme Matrix, on nous vend un mirage, qui n'existe pas réellement, peut-être pour nous rendre dociles, ou alors pour nous faire sentir comme des merdes parce qu’on n’y arrive pas vraiment. Vraiment, qui arrive à rayonner en tant que femme, travailleuse et mère à la fois, sans devoir défavoriser un des aspects de sa vie, au risque de frôler le burn out?

En 7 ans, ma vie de femme indépendante et travailleuse, celle qui occupait tout mon temps, a bien changé.

Il y a 7 ans, j'étais célibataire, je travaillais dans une grande entreprise sous les ordres d'un chef incompétent et pervers narcissique. Je passais mes soirées à boire des verres avec mes amis, à aller au ciné ou dans des sorties parisiennes, je faisais du shopping presque tous les weekends, je mettais un point d'honneur à prendre soin de moi, de mon corps, de mon maquillage impeccable. Aujourd'hui, en 2018, cela fait désormais 4 ans que je ne travaille plus en entreprise et que je suis à mon compte, équivalent à un mi-temps. Je ne m'achète presque jamais rien, pour moi en tout cas. Je sors peu, notamment parce que je n'ai pas très envie de payer une baby-sitter pour payer en plus le ciné ou le théâtre. Je passe peu de temps à prendre soin de moi, non pas comme une conséquence d'un manque de temps mais plutôt comme une cause de mon rejet de ma nouvelle image: cernes, rides, kilos en trop... qui a envie de s'occuper d'une silhouette qui ne plaît plus? Justement cette silhouette, ce visage, que je trouve si différents de ceux d'il y a 7 ans ne me font plus me sentir femme séductrice/séduisante comme c'était le cas avant. Et voilà pour le cercle vicieux.

Sur le plan professionnel d'ailleurs, je n'aime pas non plus celle que je suis.

Je travaille, un peu, je m'ennuie beaucoup, le manque de challenge intellectuel, mais aussi d'interactions avec des collègues comme cela est le cas en entreprise me manquent terriblement. Pourquoi ne reprends-tu pas une activité professionnelle, me direz-vous?

Parce qu'il y a un autre paramètre dans l'équation: ma vie de mère.

J'ai choisi de quitter une entreprise qui ne me permettait pas de voir mes enfants aussi souvent que je le voulais. Je peux aller les chercher à l'école à 16h15, elles me rendent dingo les mercredis pluvieux, mais nous sommes ensemble. C'est aussi grâce à cela, grâce au fait de savoir que je suis là pour gérer le quotidien que le Mari peut quant à lui mener sa carrière tout en sachant qu'il n'a pas à s'inquiéter pour le rendez-vous chez le médecin de la petite ou le cours de musique de la grande. Un modèle traditionnel vous me direz? pas tant que cela, dans la mesure où ce choix nous a été imposé, entre la différence salariale homme/femme et le fait que sa carrière lui plaît tandis que la mienne me rapprochait chaque jour un peu plus du burn-out.

Et puis, il y a aussi, le mirage que la société nous projette, face à la maternité.

On nous dit qu'on peut tout avoir, n'importe quand. Qu'à 40 ans, on peut avoir des enfants, d'ailleurs on connaît toutes une copine/cousine/soeur de machin truc qui a eu un enfant à 45 ans. J'ai eu mon 1er enfant à presque 30 ans, mon 2ème 19 mois plus tard. A 34 ans, quand j'ai voulu un 3ème enfant, je me suis dit que rien ne pressait, qu'on avait le temps mais que pour les enfants, c'était "mieux" de ne pas avoir trop d'écart. Au final, j'ai 36 ans, une insuffisance ovarienne précoce, 3 fausses couches à mon actif et une ménopause qui me pend au nez d'ici 4 ans... Moi, je le sais... mais combien sont-elles, celles qui attendent, ou qui pensent que de toute façon "on peut faire des stimulations ou des fivs"... sauf que quand tu n'as plus de réserve ovarienne, ça sert à rien de faire une PMA. Et puis au final, combien auront conscience de leur propre horloge biologique? Et surtout, combien auront les moyens d'aller faire congeler leurs ovocytes en Espagne ou ailleurs?

A vouloir faire croire aux femmes qu'elles peuvent tout faire, ne les rend-on pas malheureuses?

Car au final, je crois que le seul endroit où je me montre femme, mère, travailleuse, futile, utile, tout et son contraire, c'est ici, à travers cet espace où je vous parle de nos sorties, de nos vacances, des produits de ma salle de bain, de mes recettes de cuisine, de tout ce qui fait la multiplicité de ma vie d'être humain.

Je ne devrais pas vraiment me plaindre, c'est d'ailleurs plutôt un constat ou une réflexion qu'un mur des lamentations. Je n'ai pas le sentiment d'avoir une vie personnelle riche, ni d'avoir une vie professionnelle palpitante, et ma vie de mère, qui fait tout de même partie de mon quotidien, n'est pas celle que j'aurais souhaitée puisque je n'arrive pas à avoir cet enfant qui nous compléterait.

Au final, la société est un peu responsable de cette amère constatation.

On me promet depuis mon plus jeune âge de pouvoir tout faire, mais surtout on me dit que je suis l'égale de l'homme. Pourtant, je n'ai jamais été payée autant qu'un homme, j'ai toujours moins bien gagné ma vie que mon mari aussi. Mon mari, quant à lui, a eu droit à une dizaine de jours pour faire connaissance avec nos enfants, quand moi j'avais quelques petits mois. Mon horloge biologique tourne bien plus vite que celle de mon Mari...

Je m'appelle Cécile, j'ai 36 ans, à vouloir tout me promettre, je ne sais plus vraiment comment me définir, ni qui je suis vraiment.’’

 

 

Source : huffingtonpost.fr