‘’C`est mon histoire : j`ai échappé au cancer du col de l`utérus’’

« Je viens d’un campement. D’ailleurs, mes parents y vivent encore. Moi j’aspirais à plus. Quand j’ai quitté le campement, je me voyais déjà revenir en super-héroïne auprès des miens. Je me voyais rentrer avec de l’argent durement gagné dans un travail derrière un bureau et dire à mon père qu’il pouvait laisser le champ et venir se reposer en ville. Ce n’est pas exactement ce qui s’est passé. L’oncle chez qui je suis venue vivre ne m’a jamais envoyée à l’école. J’ai été réduite au statut de fille de maison. J’avais tellement honte que je ne disais rien à mes parents. A 15 ans, je suis partie de chez lui.

« Quand je trouvais une famille où travailler, j’étais la plus heureuse. »

Je me suis mise à mon propre compte en quelque sorte. Je dormais ça et là chez des amis. Quand je trouvais une famille où travailler, j’étais la plus heureuse. Les salaires sont ridicules. Ces bonnes femmes nous demandent la lune et plus encore. Mais, en retour elles nous donnent des miettes et nous traitent généralement comme des sous-hommes. Mais, je ne me plaignais pas. J’avais un toit et je restais jusqu’à ce que je ne puisse plus supporter les enfants ou que le mari devienne trop tactile ou que la femme perde complètement la tête.

La main du destin

J’étais depuis 3 mois sans emploi, quand on m’a parlé d’une dame qui avait besoin d’une nounou pour sa fille de trois mois. Ce genre de boulot, c’est le paradis pour moi ! Du pain béni ! Les bébés sont des anges. Le courant est tout de suite passé avec elle. Si bien qu’elle me donnait plein de conseils sur ma santé, mon hygiène, ma vie. J’étais très heureuse d’être tombée dans une bonne maison. Je comptais bien rester aussi longtemps que possible.

« Mais j’étais assise dans le rang, alors naturellement après son tour, ils sont venus me chercher. Je les ai suivi. »

Un mois après mon arrivée, une ONG organisait dans notre quartier des dépistages gratuits. Ma tantie a battu leur campagne comme si sa vie en dépendait car elle avait perdu sa cousine d’un cancer du sein une année auparavant et était très intéressée par les questions de dépistage. Je l’entendais au téléphone, je la voyais dans la rue. Elle savait de quoi elle parlait. Le jour J, je me suis rendue sur les lieux plus pour apporter une aide à ma tantie avec le bébé que pour me faire dépister. D’ailleurs, je n’avais pas vraiment l’âge du dépistage. Il fallait avoir 25 ans. Mais j’étais assise dans le rang. Alors, naturellement après son tour, ils sont venus me chercher et je les ai suivis.

Pour l’examen, il m’a demandé de m’allonger avec les jambes relevées. A l’aide d’une sorte de «  longue loupe sur fil », il voyait l’intérieur de mon utérus. Plus tard, j’ai appris qu’il s’agissait d’une coloscopie. L’examen n’était pas vraiment douloureux. Mais, le médecin était par contre bien silencieux. Il m’a demandé si j’étais venue seule. J’ai dit que ma tantie était passée juste avant moi. Ils l’ont faite rentrer. Il nous a alors dit qu’il y avait des tâches à l’écran et que je devais revenir dans deux jours parce qu’il avait fait un prélèvement pour avoir une confirmation.

Un mal pour un bien

Le résultat s’est avéré positif. Mais j’avais de la chance d’être venue, parce que c’était un stade très précoce de la maladie et que je serais traitée et que je guérirais. J’avais déjà vu à la télé l’histoire de personnes retenues pour un rôle alors qu’elles étaient seulement venues accompagner d’autres. Je trouvais ces histoires incroyables. Puis, la vie me donne en une seconde chance parce que j’ai accompagné ma tantie à son dépistage. J’ai suivi le traitement. Dans mon cas, il s’agissait d’une cryothérapie. J’ai eu énormément de chance d’avoir été dépisté au tout début de la maladie. J’ai donc eu la chance de ne pas voir les tâches se développer en cancer.

Sauvée

Lorsqu’il m’a été confirmé que j’étais hors de danger, que toutes les cellules précancereuses avaient été détruites, je suis retournée auprès de mes parents. Un aller simple sans retour pour l’instant. Presqu’avoir un cancer m’a ouvert les yeux sur les choses qui comptent, sur les gens qui comptent. J’ai 18 ans et je n’ai ni diplôme, ni argent. Ma mère est malade et j’ignore de quoi le futur sera fait. Il me fait un peu peur quand j’y pense bien. Mais, je viens d’échapper à un cancer alors je pense que la vie a quelque chose pour moi en stock ! »

 

 

Photo d’illustration