Marabouts, voyants et faiseurs de miracles : recours des jeunes filles pour avoir les hommes

Avoir leurs hommes à elles seules, ne les partager avec personne, faire en sorte qu'ils n'éprouvent jamais l'envie de regarder une autre fille, qu'ils se mettent en quatre pour satisfaire leurs moindres désirs sans broncher. Est-ce qu’elles pourront trouver l’âme sœur un jour ? Comment sera l’heureux élu ? Quand est-ce que ça se fera ? Comment faire pour avoir un mari ou un copain riche ? Telles sont, entre autres préoccupations, celles qui poussent les filles à recourir aux marabouts, féticheurs, voyants et autres faiseurs de miracles.

Reposant tous leurs espoirs sur les ces liseurs d'avenir, ces jeunes filles n'hésitent parfois devant rien et ne lésinent sur aucun moyen pour avoir ce qu'elles désirent. Logé au marché Colobane, Abdou Khadre Gassama est un voyant, la quarantaine, le teint clair. Dans sa minuscule chambre, il utilise aussi bien les cauris, le sable que le Coran pour faire son travail. «Beaucoup de filles viennent de partout me voir et la plupart du temps, elles viennent pour des questions d’hommes. Parfois, c’est pour que je leur montre lequel des hommes qu’elles fréquentent est le meilleur. Souvent, elles me demandent de leur donner des choses pour bien garder leurs amis pour qu’aucune fille ne les approche». Il renseigne également que certaines filles viennent le voir pour se faire avorter. «La voyance est très difficile. Et ce n’est pas permis à tout le monde. Moi, je l’ai appris de mes parents et ça fait maintenant plusieurs années que je la pratique», raconte fièrement Gassama. Ses consultations sont à la portée de toutes les bourses. Si c'est la voyance à l'aide du sable ou des cauris, il faut lui donner 500 francs Cfa et si c'est pour le «listixaar», c'est-à-dire à partir du saint Coran, il faut débourser 1000 F Cfa. Il précise : «le listixaar est le plus sûr des techniques de voyance. Car c’est basé sur le Coran». 

Comme tout métier, le sien n'est pas sans risques. «Les djinns peuvent nous apparaître en rêve pour nous détruire», dit-il. De son côté, Tata Diouma, une femme d’une noirceur éclatante, la cinquantaine, n’aime pas trop parler de son travail, contrairement à Gassama. «Je ne peux pas parler de mon travail. Car les génies me prendraient mes cauris», argumente-t-elle. Elle se limite simplement à dire que c'est à 500 francs qu'elle fait ses consultations. Son moyen de travail, ce sont les cauris. Pour prédire l’avenir, tata Diouma présente au client d’abord quatre cauris en plus de la pièce de 500 F Cfa enveloppée dans un mouchoir blanc. Ce dernier murmure tout bas l’objet de sa visite et souffle sur les cauris. «Si vous formulez la Fatiha ou si vous crachez, les cauris ne verront pas vos soucis. Il faut simplement souffler dessus», fait remarquer Tata Diouma. Elle explique que lorsqu’elle «voit» de mauvaises nouvelles, elle ne le dit pas directement à son interlocuteur, mais lui suggère de faire des sacrifices pour les conjurer.  Kabirou, très sollicité en matière de voyance, habite à Grand-Yoff, non loin du marché. Avec 200 F Cfa pour la consultation, les personnes de différentes classes d’âge surtout les jeunes filles ne cessent de frapper à sa porte. C’est avec le sable qu’il travaille «la vérité sort du sable», explique-t-il. 

Des jeunes filles adeptes des voyants se confient

Recourir aux voyants, marabouts, faiseurs de miracles pour résoudre des soucis liés aux hommes, des filles reconnaissent s’adonner à une telle pratique. C'est le cas de A. Ndiaye, jeune fille croisée chez la voyante Tata Diouma à Grand-Yoff. Sur les raisons qui l'ont poussée à venir voir la dame, elle soutient : «mon copain, je ne le vois plus, je doute qu'il y ait une autre fille dans sa vie. Je veux m'en rassurer, c'est pourquoi je suis venu consulter la voyante pour qu'elle m'édifie».  Mieux, ajoute-t-elle, «je veux savoir ce qu’il en est. Et je veux qu'elle me donne des recettes pour consolider mes relations avec mon homme». Agée de 20 ans seulement, une autre fille raconte : «Il y a plusieurs hommes dans ma vie, venir ici me permet de savoir lequel d'entre eux est le meilleur pour moi». Ce qu'elle dit attendre de la voyante, c'est qu'elle lui donne des recettes pour bien retenir cet homme. 
«J’y vais fréquemment, surtout quand je m’inquiète pour mon travail, mais aussi quand j’ai des problèmes avec mon mari», soutient Sokhna Diop, qui précise : «Parfois, ils te disent la vérité, parfois non». Mais elle estime que «seule la voyance permet de connaître les sacrifices à faire en cas de maladie, de préoccupation, pour avoir le salut». 
D'autres filles, par contre, soutiennent qu'elles recourent aux marabouts pour des raisons autres que les hommes. C’est le cas d’Amina Keinde. Cette demoiselle trouvée dans une boutique en train de faire ses achats, explique : «J’y crois car ça fait partie de notre tradition. Je vais souvent les voir, pour solliciter des prières contre les mauvaises langues et les mauvais actes». Trouvée en train d’attendre son tour chez un voyant à Khar-Yalla, Kiné Diop, commerçante, dit consulter les voyants seulement pour voir comment se porte son commerce. Elle explique en ce sens : «Au Sénégal les gens sont méchants, ils peuvent faire tout pour te détruire, surtout s'ils voient une personne qui a réussi dans sa vie. De ce fait je prends toutes mes précautions». 

 

Source : autre presse